Paquinou 2025 : Marée humaine dans les gares d’Abidjan, ruée des Ivoiriens vers les villages du centre
Abidjan, 17 avril 2025. À peine les premières lueurs de l’aube percent-elles le ciel que les gares routières d’Adjamé, épicentre du transport interurbain à Abidjan, sont déjà bondées. Il est 4 heures du matin, et les voyageurs affluent en masse, bras chargés de valises, ballots et provisions, impatients de prendre la route vers leurs villes et villages d’origine.
Cette effervescence n’est pas anodine : dans trois jours, la Côte d’Ivoire célébrera la fête de Pâques, et pour les communautés baoulées, cela signifie le grand rendez-vous de Paquinou – un moment sacré de retrouvailles familiales et communautaires, marqué par les réjouissances et le retour aux racines.
Un exode massif vers le centre du pays
« On est là depuis 6 heures. Je veux vite rentrer à Bouaké pour me préparer pour la fête », confie Amenan Chimène, assise sur ses bagages, les yeux brillants d’excitation. Comme elle, des milliers d’Ivoiriens ont pris d’assaut les gares, motivés par un profond attachement à cette tradition.
Konan Michel, chef de gare de la compagnie UTB à Adjamé, confirme la montée en puissance du flux. « Aujourd’hui, on prévoit 70 départs, dont 50 pour Bouaké uniquement. Et pour vendredi, qui sera le pic, on attend jusqu’à 200 départs. On transporte près de 7 000 passagers par jour », explique-t-il. Bouaké, Sakassou, Beoumi, Daoukro, Dimbokro… Toutes les destinations vers le centre du pays sont prises d’assaut.
Entre ambiance festive et tension dans l’attente
L’atmosphère à la gare est électrique : klaxons, cris de vendeurs ambulants, musique festive crachée par des haut-parleurs… Mais derrière cette animation joyeuse, la fatigue et l’impatience gagnent certains visages. « Je suis venue à 5 heures du matin et je suis encore sur le 10e départ. Je voulais arriver tôt au village… », soupire dame Kouassi Véronique, visiblement exténuée.
Dans ce grand mouvement migratoire temporaire, les jeunes filles de ménage ne sont pas en reste. Nombre d’entre elles suspendent leurs activités pour rentrer fêter Paquinou en famille, provoquant des tensions dans les foyers abidjanais où elles sont employées.
Un dispositif de sécurité renforcé
Face à cette ruée, les autorités ont renforcé la sécurité. Des patrouilles sillonnent les alentours, depuis l’Église Universelle du Royaume de Dieu jusqu’à la gare UTB. Des agents en uniforme surveillent les mouvements, appuyés par des véhicules de police stratégiquement postés.
« Tout est mis en œuvre pour protéger les personnes et les biens. On veille également à éviter les accidents », rassure le Commissaire Touré Abdoulaye Kader. Les conducteurs, eux, ont reçu des instructions strictes. Des incitations financières sont même prévues pour ceux qui font preuve de prudence. Tous les cars sont désormais équipés de GPS pour un suivi en temps réel.
Paquinou, bien plus qu’une fête
Au-delà du simple déplacement, c’est tout un élan affectif et culturel qui anime les voyageurs. « Je vais retrouver ma famille et en profiter pour fêter dignement. C’est un moment que j’attendais depuis longtemps », témoigne dame Koffi Ruth, soulagée d’avoir enfin trouvé une place dans un car.
Malgré la rareté des véhicules, la détermination des passagers reste intacte. Tous veulent vivre pleinement ce moment fort de l’année, entre retrouvailles chaleureuses, musiques traditionnelles et mets emblématiques comme le foutou au kabato. Paquinou n’est pas qu’un voyage : c’est un retour au cœur des liens familiaux et de l’identité baoulé.
CAM