Depuis la fin du mois de janvier de cette année, la ville d’Abidjan vit au rythme des opérations de démolitions des quartiers dits précaires ou jugés à risques. Les sous-quartiers Gesco et Mossikro-Banco à Yopougon et Boribana à Attécoubé ont déjà subi la furie des bulldozers et autres pelleteuses du District d’Abidjan. 176 sites sont concernés par ces opérations de déguerpissements et de démolitions. Sur ces opérations, beaucoup a été dit et écrit.
De nombreuses informations dignes de foi font état de ce que :
– certains des sous-quartiers rasés ou à raser ont bénéficié de lotissements en bonne et due forme ;
– le District a procédé aux démolitions dans la précipitation, sans associer les autres démembrements de l’Etat et les collectivités territoriales de la ville d’Abidjan intéressées, d’une manière ou d’une autre, par ces démolitions et, surtout, sans aucune mesure d’accompagnement pour les populations impactées ;
– les mises en demeure brandies par le District et derrière lesquelles il se réfugie n’ont pas été exécutées par un commissaire de justice et perdent, de ce fait, leur légalité ;
– les opérations de démolitions en cours sont frappées du sceau de la voie de fait et sont une atteinte flagrante aux droits de l’homme et au droit à la propriété.
En ces occasions particulièrement difficiles pour les populations impactées et meurtries, le mouvement « Les Démocrates de Côte d’Ivoire » voudrait associer sa voix à celle de toutes les personnalités politiques, des organisations politiques et de la société civile et des personnes anonymes qui leur ont exprimé leur compassion et leur solidarité.
Notre position et nos commentaires
Le mouvement « Les Démocrates de Côte d’Ivoire » dénonce les méthodes cavalières et inutilement déshumanisantes du District d’Abidjan et note son manque d’empathie pour les victimes en ne leur proposant pour tout recours que de dormir à la belle étoile, sous les ponts, de perdre toute dignité et leurs emplois, d’être déscolarisés, d’être livrés à eux-mêmes, à la vie et à ses vicissitudes.
Le mouvement « Les Démocrates de Côte d’Ivoire » s’indigne de ces déguerpissements et démolitions inappropriés au moment où les chrétiens observent le traditionnel carême et seront rejoints, au mois de mars, par les musulmans avec le Ramadan. Le mouvement « Les Démocrates de Côte d’Ivoire » dénonce le peu d’intérêt manifesté pour les conditions dans lesquelles les chrétiens et les musulmans jetés à la rue ou qui seront jetés à la rue observeront ces moments de grande piété.
Certaines des raisons avancées pour justifier ces démolitions tous azimuts sont sujettes à caution, notamment celles relatives à la libération des emprises de certaines voies autoroutières. Si tel est le cas, tous les bâtiments qui bordent le boulevard Valéry Giscard D’Estaing ainsi que la cité ADO attenante à l’autoroute Abidjan-Bassam devraient, eux aussi, être rasés.
Pour le mouvement « Les Démocrates de Côte d’Ivoire », les raisons de ces démolitions massives et précipitées sont politiques, sans nier la pertinence de l’assainissement du cadre de vie, et pourraient être recherchées dans les élections à venir de 2025. La crise de 2010-2011 a été pleine d’enseignements et hante les esprits.
Ces zones densément peuplées, notamment Gesco, Mossikro, Boribana, Adjouffou, Gonzagueville, etc. où on peut cacher facilement des armes, sont difficilement traitables en tant que théâtres d’opérations. Le RHDP voudrait-il se prémunir d’éventuels débordements armés issus de ces zones comme on l’a vu avec le commando invisible à Abobo ? Nul ne saurait le dire clairement aujourd’hui. Mais, une chose est certaine, le RHDP préfère l’émoi et la réprobation actuels suscités par ces démolitions à ceux que pourrait suscitée une guerre entre l’armée et une milice issue de ces zones. L’auto-goal actuel, puisqu’il compte de nombreux militants dans ces zones, qu’il s’est appliqué pourrait dans une certaine mesure s’expliquer par cette raison de sécurité pour lui-même que personne n’osera avouer. C’est une lecture possible.
Pour le mouvement « Les Démocrates de Côte d’Ivoire », ces opérations organisées par le District d’Abidjan et pilotées par le ministre gouverneur Cissé Bacongo, Directeur exécutif du RHDP, sont une menace pour la paix sociale. En plus :
– de jeter à la rue des milliers de personnes, obligées de dormir à la belle étoile ;
– de détruire des activités économiques et de démolir des emplois ;
– de rendre les élèves déscolarisés ;
– de provoquer la déchéance sociale de nombreuses personnes et de les condamner à l’indigence et à la précarité,
les actions déshumanisantes du Directeur exécutif du RHDP sont susceptibles de disloquer des familles, de ruiner des avenirs et de conduire à de nombreux décès pour les personnes fragiles, incapables de supporter leurs nouvelles conditions de vie ou incapables de se refaire matériellement, moralement et socialement.
Le mouvement « Les Démocrates de Côte d’Ivoire » constate malheureusement que, sous le régime du RHDP, l’Etat social a disparu. En lieu et place, nous avons un Etat ‟prédateur” qui n’hésite pas à réduire astucieusement le revenu des ménages qui restent étranglés par une vie de plus en plus chère d’année en année. Non content de cela, le régime RHDP n’hésite pas à mettre en insécurité sociale les populations en détruisant des emplois qu’il ne crée pas et en jetant à la rue des familles entières. Le Directeur exécutif du RHDP, par ses opérations de déguerpissements et de démolitions, a rompu le pacte civil et social qui veut que l’Etat de droit soit associé à un Etat social pour construire une société de semblables et d’équité.
Après le retentissant scandale des détournements de deniers publics épinglés par la Cour des comptes et qui a fait le buzz au début du mois de janvier de cette année, les Abidjanais, en particulier, et les ivoiriens, en général, étaient en droit d’attendre, que des sanctions exemplaires soient prises après la CAN. Mais, au lieu de cela, le régime a choisi d’orienter les regards des ivoiriens ailleurs, faisant passer la question de ces détournements par pertes et profits.
Le mouvement « Les Démocrates de Côte d’Ivoire » s’insurge contre cette gouvernance et demande au RHDP de s’habiller de visage humain et social ; Abidjan ne sera pas habitée que par des riches. Il salue, à ce propos, l’initiative du Premier ministre d’organiser une concertation avec les différents acteurs pour assurer une meilleure coordination des opérations de déguerpissements.
Pour sa part, le mouvement « Les Démocrates de Côte d’Ivoire » souhaite que les zones à risques fassent l’objet d’un aménagement particulier. Une zone n’est à risques que lorsque les hommes ne veulent pas se donner les moyens de dompter la nature. L’archipel du Japon qui est une zone à haut risque sismique, 20% des séismes les plus puissants sur terre y sont recensés chaque année, est, pourtant, densément peuplé.
Il faut aussi renforcer le cadre réglementaire pour protéger les détenteurs de titres de propriété contre les expropriations d’un autre temps et face à un Etat démolisseur qui reste un monstre froid et sans état d’âme. Etre détenteur d’un ACD ne garantit pas aujourd’hui que votre propriété ne soit pas détruite en cas de démolitions en masse, encore moins un dédommagement correspondant à sa valeur réelle.
Fait à Abidjan, le 29 février 2024.
Pour « Les Démocrates de Côte d’Ivoire ».
Le Président
Pr. Séraphin Prao