Marché hypothécaire africain : vers un nouveau modèle de financement du logement en Côte d’Ivoire
L’Initiative Américaine pour le Marché Hypothécaire Africain (AIHFMI) a organisé une table ronde stratégique en Côte d’Ivoire, avec pour ambition d’accélérer le développement d’un écosystème moderne et durable de financement du logement. L’événement a réuni institutions publiques, acteurs privés et experts techniques autour d’un objectif commun : proposer des solutions innovantes et inclusives pour résorber le déficit criant en logements abordables dans le pays.
Une plateforme de dialogue pour un écosystème résilient

L’objectif principal de cette initiative est la mise en place d’une plateforme de dialogue de haut niveau, soutenue par l’expertise américaine en matière de finance, de gouvernance et d’innovation. Cette plateforme servira de relais entre les cadres d’investissement internationaux et les besoins spécifiques du marché ivoirien, en favorisant des solutions adaptées aux réalités locales.
Pierre-Aimé (SFI – Banque mondiale) : « Favoriser des solutions hybrides et inclusives »
Pierre-Aimé, responsable des opérations pays de la Société Financière Internationale (SFI), a salué l’initiative :
> « Il s’agit de réfléchir à des mécanismes de financement capables d’intégrer les populations exclues du système bancaire traditionnel. La SFI est disposée à accompagner le processus pour répondre au déficit structurel en logements abordables. »
Il a insisté sur la nécessité d’élargir les approches : financement du crédit hypothécaire, location-vente, solutions digitales pour les travailleurs du secteur informel… Autant de leviers pour toucher un public plus large.
Carole Ollo Agnero (Chambre du droit des affaires et de l’immobilier) : « Repenser l’habitat en fonction des réalités sociales »
Pour Carole Ollo Agnero, présidente de la chambre du droit des affaires et de l’immobilier et directrice générale de KRENO Consulting, l’initiative s’inscrit dans la dynamique de l’État ivoirien d’offrir des logements décents :
« Le gap en matière de logement est énorme (800 000). Il faut structurer une plateforme capable d’identifier les vrais problèmes et de proposer des solutions concrètes, avec des incitations fiscales pour attirer les investisseurs. »
Elle plaide également pour une diversité des modèles d’accès au logement, entre location et location-vente, et appelle à subventionner les coûts de viabilisation et de construction.
Koalla Celestin, Directeur du Logement et du Cadre de Vie au Ministère de la Construction :

« Faire la révolution du logement social »
Koalla, Directeur général du logement et du cadre de vie au ministère de la Construction, a adopté un ton résolument audacieux :
> « Il faut une révolution dans notre approche. Le problème n’est pas technique mais financier. Nous devons intégrer les 70 % d’Ivoiriens issus du secteur informel dans nos schémas de logement. »
Il a notamment annoncé la fin des programmes de villas pour le logement social au profit d’immeubles collectifs, plus adaptés aux populations à faibles revenus. Il appelle également à un changement de paradigme bancaire :
> « La BCEAO doit évoluer pour mieux répondre aux besoins réels des Africains. Si on ne peut pas tracer les revenus de quelqu’un, ça ne veut pas dire qu’il ne peut pas payer. »
Vers une offre massive en location-vente
Le gouvernement ivoirien, appuyé par le Premier ministre SEM Robert Beugré Mambé, mise désormais sur la location et la location-vente pour répondre à la demande croissante. Avec un déficit estimé à 800 000 logements, l’État a déjà initié la construction de 40 000 unités avec 25 000 dans un programme d’urgence dont 4000 ont été réalisés, principalement en accès direct à la propriété, un modèle jugé aujourd’hui inadapté à la majorité des Ivoiriens.
Des partenaires comme la BOAD, la BIDC ou la Banque Mondiale soutiennent cette nouvelle orientation avec des prêts à long terme à taux préférentiels. Le Fonds de Garantie du Logement Social et la Commission nationale d’attribution des logements sont désormais opérationnels. La plateforme ANA (Agence Nationale de l’Habitat) s’apprête à lancer les premières souscriptions d’ici la fin de l’année, avec des critères d’éligibilité adaptés aux travailleurs informels.
Une dynamique nouvelle
En somme, cette table ronde marque un tournant stratégique. En mettant l’accent sur l’inclusion, l’innovation et le réalisme économique, l’État ivoirien, avec l’appui d’investisseurs américains, s’engage dans une transformation profonde de sa politique du logement. Une approche qui pourrait servir de modèle dans toute l’Afrique de l’Ouest.
CAM